lundi 25 janvier 2016

Doll (lettre 34)

N'est-ce pas qu'on ne peut pas avoir honte de soi ? 
Même quand on se relit. Parfois, c'est difficile. Mes premières lettres sont idiotes et puériles. Je ne savais pas quoi dire pour que tu me remarques, pour que tu m'écrives. 
Aujourd'hui, j'ai trouvé un livre qui 
me parle
de toi. 
Un livre d'un Jonathan Delachaux qui est peintre. Tu y es avec tes amis. Tu y es beaucoup. Ça ne me rapproche pas de toi, ça m'en éloignerait presque. Je suis une miette minuscule. Tu es un géant. 
...
Ce n'est pas comme ça que je dois penser
ce ne sont pas les bons mots
ou les bonnes catégories 
J'ai de la peau qui se détache de tout le corps 
On dirait que j'ai la lèpre mais le médecin me dit le contraire. 
Qui croire ? 
Elle ? Moi ? 

C'est quoi toute cette peau ? Pourquoi peler en hiver ?
… 
Deux semaines entières que je ne travaille plus ; je perds la mémoire. Ça s'efface je te jure. J'ai mal à la tête comme si l'on piochait dedans et que l'on en retirait des morceaux. J'ai comme des creux des absences des choses qui s'imposent et qui disparaissent avec autant de force que lorsqu’elles viennent. Des trous. D'autres trous et puis des pleins. Ça boursoufle. Je me fixe ou bien je fixe quelque chose me demandant si je l'ai assez vu, si je ne devrai pas plutôt le regarder encore, autrement, sous un autre angle. Ça peut être une chaise, un oiseau. J'ai cru voir un pélican. Une mouche, un verre de terre, un détail comme l'oreille d'une vache, un sabot. Idem dans le train, je ne peux m'empêcher de fixer. Hier, je me suis attachée à une mèche de cheveux roses qui me semblait parfaitement réelle, je suis allée demander à cette fille si cette mèche était vraie. Elle m'a dit oui, je la crois.  J'ai même touché ses vrais cheveux. Ils n'étaient pas teint, roses, oui. 
Tout commence à m'étonner, moi en premier.
Avant j'étais groupie. 
M'en fous. 
Plus jamais. 
J'aime ou je n'aime pas. 
Il n'y a fondamentalement rien d'autre à dire. Je dis dire, pas faire. Je ne sais toujours pas ce que je vais faire mais je sais ce que je ne dirai plus. Tu me l'apprends. Ou je l'apprends de toi. La liberté fait envie. 

J'espère recevoir des nouvelles de toi très vite. J'espère aussi que je pourrai t'écrire, que j'en trouverai le temps et l'énergie. Un jour, peut-être n'aurai-je plus honte de rien. 

Je t'embrasse. 

Doll





Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.